J’ai hésité à faire un épisode sur ce sujet. Je ne parle pas habituellement de faits d’actualité, mon sujet principal étant la méditation, une pratique ancienne de plusieurs milliers d’années !
Cependant, une discussion sur le racisme et son impact sur la société s’est imposée ces derniers jours. Un drame individuel, la mort de George Floyd, a embrasé la nation USA, éclairant d’une lumière crue la réalité du racisme.
Dans cet épisode, je partage ma propre expérience avec le racisme – celle d’un émigré arabe musulman -, ainsi qu’une réflexion sur les mécanismes du racisme et sur la route nécessaire pour se libérer graduellement de ce fléau.
Après avoir regardé l’épisode, dites-moi, que pensez-vous de la situation ?
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Matthieu Ricard explique que dans la quête du bonheur, l’altruisme est bien supérieur à l’égoïsme. Dans cet épisode Lecture Méditative, on va découvrir un extrait du livre Plaidoyer pour l’altruisme.
La recherche du bonheur égoïste semble vouée à l’échec pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, du point de vue de l’expérience personnelle, l’égoïsme, naît du sentiment exacerbé de l’importance de soi, s’avère être perpétuelle source de tourments. l’égocentrisme multiplie nos espoirs et nos craintes et nourri les ruminations de ce qui nous affecte.
L’obsession du moi nous conduit à magnifier l’impact du moindre événement sur notre bien être, à regarder le monde dans un miroir déformé. Nous projetons sur ceux qui nous entoure des jugements et des valeurs fabriquées par notre confusion mentale. Ces projections constantes nous rendent non seulement misérables, mais aussi vulnérables à toutes les perturbations extérieures et à nos propres automatismes de pensées, qui entretiennent en nous une sensation de malaise permanent.
L’étroitesse de notre monde intérieur fait qu’en rebondissant sans cesse sur les parois de cette bulle, nos états d’esprit et nos émotions s’amplifient de manière disproportionnée et envahissante.
La moindre joie devient euphorie, le succès nourrit la vanité, l’affection se fige en attachement, l’échec nous plonge dans la dépression, les déplaisirs nous irritent et nous rendent agressifs.
Nous manquons de ressources intérieures nécessaires pour gérer les hauts et les bas de l’existence.
Ce monde de l’égo est comme un petit verre d’eau : quelques pincées de sel suffisent à le rendre imbuvable. A l’inverse, celui qui a fait éclater la bulle de l’égo est comparable à un grand lac : une poignée de sel ne change rien à sa saveur. Par essence, l’égoïsme ne fait que des perdants : il nous rend malheureux, et nous faisons à notre tour le malheur de ceux qui nous entoure.
La deuxième raison tient au fait que l’égoïsme est fondamentalement en contradiction avec la réalité. Il repose sur un postulat erroné, selon lequel les individus sont entités isolés, indépendantes les unes des autres.
L’égoïste espère construire son bonheur personnel dans la bulle de son égo.
Il se dit en substance : “ A chacun de construire son propre bonheur, je m’occupe du mien, occupez-vous du votre. Je n’ai rien contre votre bonheur mais ce n’est pas mon affaire.” Le problème est que la réalité est tout autre.
Nous ne sommes pas des entités autonomes et notre bonheur ne peut se construire qu’avec le concours des autres. Même si nous avons l’impression d’être le centre du monde, ce monde reste celui des autres.
L’égoïsme ne peut donc être considéré comme une façon efficace de s’aimer soi-même, puisqu’il est la cause première de notre mal-être. Il constitue une tentative particulièrement maladroite d’assurer son propre bonheur.
L’égoïsme et l’amour de soi, loin d’être identiques sont en fait deux attitudes opposées.
L’égoïste ne s’aime pas trop, mais trop peu; en fait, il se hait.
L’égoïste est un être qui ne fait rien de censé pour être heureux. Il se hait parce que sans le savoir, il fait tout ce qu’il faut pour se rendre malheureux et cet échec permanent provoque une frustration et une rage intérieure qu’il retourne contre lui et contre le monde extérieur.
Si l’égocentrisme est une constante source de tourment, il en va tout autrement del’altruisme et de la compassion. Sur le plan de l’expérience vécue l’amour altruiste s’accompagne d’un profond sentiment de plénitude, et, comme nous le verrons par ailleurs, c’est aussi l’état d’esprit qui déclenche l’activation la plus importante des aires cérébrales associées aux émotions positives.
On pourrait dire que l’amour altruiste est la plus positive de toutes les émotions positives.
De plus, l’altruisme est en adéquation avec la réalité de ce que nous sommes et de qui nous entoure. A savoir le fait, que tout est foncièrement interdépendant.
La perception habituelle de notre vie quotidienne peut nous porter à croire que les choses ont une réalité objective et indépendante, mais, en fait, elle n’existe qu’en dépendance d’autre chose. La compréhension de cette interdépendance universelle est la source même de l’altruisme le plus profond. En comprenant à quelle point notre existence physique,notre survie, notre confort, notre santé ect… dépendent des autres et de ce que nous fournit le monde extérieur — remèdes, nourritures…. — il devient facile de nous mettre à leur place, de vouloir leur bonheur, de respecter leur aspirations, et de nous sentir intimement concernés par l’accomplissement de ces aspirations.
La supériorité de l’altruisme sur l‘égoïsme, ne repose donc pas seulement sur des valeurs morales, mais aussi sur le bon sens et sur une juste perception de la réalité.
L’être humain est un animal social. On a besoin les uns des autres, autant pour notre bien-être physique qu’émotionnelle, surtout durant cette période de crise.
Dans cet épisode, je m’entretiens avec Arnaud Guétcheu, Lama bouddhiste.
Arnaud définit ce qu’est la compassion, et nous explique pourquoi elle est souvent associée à la méditation.
Il nous parle des bienfaits de ce sentiment, et Arnaud répond à la question: doit-on ressentir de la compassion pour les personnes qui nous sont nocives?
Arnaud nous parle aussi de l’école qu’il a ouverte en Inde, l’École des Soleils, pour éduquer et soutenir les enfants d’un village se trouvant à deux pas de Bodhgaya (lieu ou le Bouddha atteint l’éveil).
Lama Arnaud Guétcheu a découvert le bouddhisme en 1991 et accompli 2 longues retraites (2000/2001 et 2003/2007) dans la tradition himalayenne sous la direction d’un maître bhoutanais, dont la traditionnelle de 3 ans et 3 mois à l’issue de laquelle il a débuté une activité de transmission.
Il partage cette belle science de l’esprit à tous publics, en particulier via le site TERRES DE REPOS. Il a initié la création de l’Auberge des Bons et Vertueux, un lieu d’hébergement-retraites à Bodhgaya, la petite ville indienne où le Bouddha a atteint l’éveil.
Arnaud est aussi directeur de L’Ecole des Soleils, une petite école en Inde à deux pas de Bodhgaya.
Qu’est-ce que l’amour? On parle de l’amour inconditionnel, cet amour qui n’a besoin de rien en retour. Il y a l’amour passionnel qui peut détruire. Il y a l’amour omniprésent, celui qui émerge lorsque la peur disparait et donne du sens à la vie. La chanson ne dit-elle pas « Nous n’avons besoin que d’amour! »
Le sentiment d’amour accompagne nos vies. Parfois il grandit et d’autres fois se perd dans nos soucis. L’amour par moment nous apporte une grande joie, mais lorsqu’il semble avoir disparu, nous rempli de désespoir. Mais malgré cette proximité, pour beaucoup, l’amour reste un mystère.
Mais qu’en pense le bouddhisme, cette philosophie épurée de la vie fondée sur l’expérience des sens et du moment présent?
Qu’est ce que l’amour selon le bouddhisme
La réponse nous vient de l’un de ses plus respectés porte-parole, le moine zen vietnamien Thich Nhat Hanh. Un ouvrage, How to Love (ed. Parallax Press), vient de paraître avec une collection de ses observations sur ce vaste sentiment humain.
Nhat Hanh note en essence qu’aimer l’autre c’est le comprendre. Et par comprendre, il entend: être capable de ressentir, sans jugement, le profond sentiment d’insatisfaction qui fait souffrir la personne qui est face à nous. Comprendre l’autre commence par créer suffisamment d’espace en soi pour d’abord se comprendre soi-même et pour ensuite pouvoir accueillir l’autre.
Si vous mettez une poignée de sel dans un verre d’eau, l’eau devient imbuvable. Mais si vous mettez le sel dans une rivière, on peut continuer à y collecter l’eau pour cuisiner, nettoyer et la boire. La rivière est immense, et elle a la capacité de recevoir et de transformer. Lorsque nos coeurs sont étroits, notre compréhension et notre compassion sont limitées, et nous souffrons.
Nous ne pouvons alors pas accepter ou tolérer les autres et leurs manques, et nous demandons qu’ils changent.
Mais lorsque nos coeurs s’élargissent, ces mêmes choses ne nous font plus souffrir. Nous avons suffisamment de compréhension et de compassion et nous pouvons étreindre les autres. Nous acceptons les autres tels qu’ils sont, et alors, ils ont la possibilité de se transformer.
Il ajoute
Comprendre la souffrance d’autrui est le plus cadeau que l’on peut offrir à une personne. La ‘compréhension’ est l’autre nom de l’amour. Si vous ne comprenez pas l’autre, vous ne pouvez pas aimer.
Le moine zen explique que tout commence par soi. Pour aimer l’autre, il faut d’abord être conscient de ses propres sentiments.
Lorsque nous nourrissons notre propre joie, nous nourrissons notre capacité à aimer. C’est pourquoi aimer c’est d’abord apprendre l’art de nourrir notre joie d’être.
Nhat Hanh observe que notre capacité à aimer a été influencée par notre éducation et nos proches.
Si nos parents ne se sont ni aimés ni compris, comment pouvons-nous alors savoir à quoi l’amour ressemble? Le plus précieux héritage que les parents peuvent donner à leurs enfants est leur propre bonheur.
Nhat Hanh parle aussi de la différence entre infatuations, ce fantasme de ce que l’autre peut devenir pour soi, et amour.
Souvent, nous désirons une personne non pas parce que nous l’aimons et la comprenons véritablement, mais pour nous distraire de nos propres souffrances. Lorsque nous apprenons à aimer et à comprendre qui nous sommes, ainsi qu’à développer une vraie compassion envers soi-même, alors nous pouvons vraiment aimer et comprendre la personne en face de soi.
Nous ne sentons parfois vide avec un grand sentiment de manque. Nous n’en connaissons pas la cause: c’est très vague, mais ce sentiment de vide en soi est bien présent. Nous espérons que quelque chose de mieux arrive pour nous permettre de nous sentir moins seuls, moins vides.
Le désir de se comprendre et de comprendre la vie est profond. Il y a également une forte aspiration à être aimé et à aimer. Nous sommes prêts à être aimés et à aimer. C’est tout à fait naturel.
Le moine zen ajoute que parce que nous nous sentons vides, nous essayons de trouver quelque chose à l’extérieur pour compenser ce manque. Au lieu de prendre le temps de mieux nous connaître soi-même, nous nous précipitions vers les objets de l’extérieur pour assouvir notre mal-être.
Lorsque nous utilisons l’autre pour assouvir nos attentes, ce qui n’est bien sûr pas possible, nous allons continuer à nous sentir vides. Chez la plupart des gens, il y a ce désir continu et cette attente que quelque chose de mieux va arriver.
Ce perpétuel sentiment d’insatisfaction ne peut pas se résoudre à l’aide de l’extérieur (rencontrer un partenaire de vie, s’enrichir…). Il est une invitation à développer plus de compréhension et de compassion envers soi-même.
Nhat Hanh continue sur l’importance de d’abord faire la paix avec soi-même avant de pouvoir rencontrer l’autre.
L’essence de l’amour bienveillant est d’être capable d’offrir de la joie. Vous pouvez être comme un rayon de soleil pour une autre personne. Vous ne pouvez pas offrir de la joie tant que vous ne l’avez pas en vous. Donc, construisez un refuge en vous, en vous acceptant et en apprenant à vous aimer et à vous guérir. Apprenez à pratiquer la pleine conscience de telle façon à pouvoir créer ses moments de joie pour votre bien-être. Alors seulement, vous aurez quelque chose à offrir à l’autre personne.
Lorsque vous aimez une personne, il doit y avoir de la confiance et de la complicité. L’amour sans confiance n’est pas tout à fait de l’amour. Bien entendu, vous devez d’abord commencer par avoir de la confiance et du respect envers vous même. Sachez que vous avez de la bonté et de la compassion en vous. Vous faites partie de l’univers; vous êtes fait de poussières d’étoiles. Lorsque vous regardez la personne que vous aimez, vous voyez qu’elle est aussi faite d’étoiles et qu’elle porte l’éternité en elle.
Développer une profonde appréciation pour la vie, pour votre vie et pour celle de la personne en face est un prérequis pour une relation harmonieuse. Autrement le risque de souffrir et de faire souffrir est bien réel.
Aimer sans savoir comment aimer blesse la personne que l’on aime. Pour savoir comment aimer, nous devons les comprendre. Pour les comprendre, nous devons les écouter.
Le plus vous comprenez une personne, le plus vous l’aimez; le plus vous l’aimez, le mieux vous la comprenez. Ce sont les deux faces d’une même réalité. L’esprit d’amour et l’esprit de la compréhension sont identiques.
Le moine vietnamien nous invite à d’abord nous connaître véritablement, et c’est là tout le but de la pratique de la pleine conscience. Car à travers la connaissance – plonger en soi – naissent l’appréciation et la compassion, et à partir de là, l’amour, qu’il soit romantique ou envers toute autre personne, peut s’épanouir.
Note: Version texte initialement publiée en avril 2015
Sources et références: Source: Maria Popova – Brainpickings ; Livre: How to Love, Thich Nhat Hanh, Ed. Parallax Press, collection Mindful Essentials, 96 pages ; Photographie illustration: RENAULT Philippe ; Photographie Thich Nhat Hanh: Paul Davis (plumvillage.org)
Dans le milieu des années 70, Tara travaillait dans une association qui aidait les plus démunis à se loger. À travers des syndicats de locataires, elle et ses partenaires, faisaient pression sur les propriétaires afin qu’ils gardent les loyers à des tarifs raisonnables et offrent des lieux de logements qui soient décents.
Un de ces syndicats de locataires était composé de familles habitant dans un immeuble détenu par un propriétaire connu pour son indécence et sa mauvaise foi. La porte-parole de ce syndicat, Denise, était une femme sûre d’elle et bien articulée. Elle travaillait dur pour galvaniser le groupe contre une importante augmentation des loyers qui risquerait de mettre beaucoup de famille à la rue.
Découvrir l’autre
À travers les nombreux mois nécessaires pour structurer le syndicat Tara et Denise sont devenues proches. Tara a dîné chez Denise, elle a joué avec ses enfants et elle était devenue familière avec les difficultés auxquelles Denise et sa famille devaient faire face. Leur appartement avait été vandalisé plusieurs fois, et il était presque impossible de garder dehors les rats et les cafards.
Le fils ainé de Denise était en prison. Un autre souffrait de dépendance à la drogue. Son mari était au chômage et endetté. Nourrir et habiller ses enfants, et chauffer la maison n’étaient pas toujours évident. Tara admirait l’implication de Denise dans le syndicat alors qu’elle avait déjà tant à faire chez elle.
Une note sous la porte
2 jours avant qu’une « grève des loyers » soit cordonnée, Denise a laissé sous la porte de Tara une note lui disant qu’elle quittait le syndicat. Tara était surprise et déçue, mais elle avait une bonne idée de ce qui a pu se passer. Tara savait qu’il arrivait souvent qu’un propriétaire soudoyât l’un des locataires pour faire capoter un projet. Et en effet, Denise avait été « achetée » par l’offre d’une nouvelle serrure, d’un break sur ses loyers, et d’un job à mi-temps pour son fils.
Les autres locataires, se sentant trahis et démoralisés, ont appelé Denise une hypocrite et une vendue. Ils changeaient de trottoir pour éviter de la croiser. Ils ne laissaient plus leurs enfants jouaient avec les siens. Elle était devenue une paria.
Ce n’était pas la première que Tara rencontrait ce genre de situation. Et lorsque c’était arrivé dans le passé, elle en avait voulu au « traitre », car cela affectait tout le monde.
Connaître c’est aimer
Mais avec Denise, c’était différent. Tara savait à quel point Denise essayait d’aider sa famille. Elle avait ressenti le degré d’anxiété auquel Denise devait faire face et son besoin d’amour.
Si nous pouvions lire l’histoire secrète de nos ennemis, nous pourrions trouver en chaque personne suffisamment d’inquiétude et de souffrance pour désarmer toute hostilité.
– Henry Longfellow, Poète américain, 1807-1882.
Tara connaissait les souffrances et les espoirs de Denise. Elle tenait à elle.
Si Tara pouvait ressentir de la compassion envers Denise, son ressenti envers les propriétaires, c’était une autre histoire. Elle les considérait comme étant de « mauvaises » personnes.
Le grand méchant homme blanc
Quelques années après l’épisode avec Denise, Tara a eu la parfaite occasion de faire face à l’une de ces « mauvaises personnes » et voir ainsi plus en profondeur. L’une des amies de Tara connaissait un homme d’affaires à la tête d’une grosse entreprise. Il voulait organisait dans sa boite un stage de pleine conscience. Il fût décidé une rencontre au déjeuner pour que Tara puisse parler à l’homme d’affaire de son programme de méditation.
L’homme d’affaires correspondait au stéréotype de Tara du riche homme blanc qui abusait et opprimait les plus faibles. Il avait été poursuivi en justice pour systématiquement avoir bloqué l’ascension des femmes dans sa société. Il discriminait surtout les femmes d’origine africaine. Tara accepta à contrecœur de le rencontrer, et elle s’attendait au pire.
Elle voulait qu’il soit heureux
Cependant, à leur déjeuner, Tara nota que cet homme était avant tout un … humain. Au début de leur rencontre, l’homme d’affaires se vanta un peu, et Tara pouvait voir qu’il cherchait à être apprécié. Elle apprit que la mère de cet homme a eu un triple pontage cardiaque quelques semaines auparavant. Son ainé souffrait d’un diabète de type I, et les week-ends, sa femme lui demandait de jouer davantage avec les enfants. Il expliqua à Tara qu’il les aimait plus que tout, mais qu’à chaque fois des importants coups de fil l’empêchait d’apprécier les barbecues, les jeux de pingpong ou les séances vidéos en famille.
Il se demandait si la méditation de pleine conscience pouvait l’aider à relaxer alors qu’il était tant sollicité. Tara savait qu’elle et cet homme étaient certainement en désaccord sur la plupart des dossiers politiques et de sociaux. Mais elle l’aimait bien et elle voulait qu’il soit heureux.
Ayant médité la douceur et la compassion, j’ai oublié la différence entre moi et les autres.
– Milarepa
Voir qui est vraiment face à nous
Même si l’on n’aime pas une personne, voire ses vulnérabilités, va nous permettre de lui ouvrir notre coeur.
On peut être en désaccord avec elle. On peut ne jamais vouloir l’inviter chez soi.
Cependant, nos impressions et nos opinions ne devraient pas nous empêcher de voir que, comme nous, cette personne ne veut pas souffrir et aspire à être heureuse. Lorsque nous voyons qui est vraiment face à nous, nous pouvons entrevoir un peu de leur « histoire secrète », et alors ressentir une compassion naturelle envers eux.
Tara Brach pratique et enseigne la méditation dans la tradition bouddhiste depuis plus de 35 ans. Elle est l’auteur de Radical Acceptance: «Embracing Your Life With The Heart Of Buddha », 2003.
La version texte du post initialement publiée en février 2015
Cet épisode est en réponse à la question de Chantal qui note:
« Par quel moyen inciter une autre personne à partager ses problèmes. Ma soeur a de la peine à faire part de ses sentiments, de ses émotions, de ses soucis. Je me demande comment l’aider! Merci si tu as des idées à me proposer! »
Vous allez y découvrir les 3 éléments à mettre en place pour pouvoir soutenir au mieux un proche qui passe par une période difficile.
“Il est plus beau de transmettre aux autres ce que l’on a contemplé que de contempler seulement.” – Saint Thomas d’Aquin
Partager avec les autres ce que l’on ressent et ce qui est important pour nous est bénéfique pour soi et pour les autres. Cela n’est pas toujours facile, mais, je pense, nécessaire.
Dans ce court podcast, j’explique pourquoi l’on doit partager, transmettre ce que l’on a reçu, pour contribuer à améliorer le monde dans lequel on vit.
Comment gérer une relation toxique, comment faire face à une personne qui nous pèse et qui nous empêche d’être bien, de nous épanouir?
Cet épisode est en réponse à plusieurs questions qui m’ont été posées par des lectrices et des participants à la formation Méditer Aujourd’hui.
Bonjour, j’aime vos podcasts qui sont très « pratico-pratiques » je trouve. Merci! J’ai une question suite à l’écoute de votre podcast: comment gérer le conflit en 3 étapes. Personnellement, lorsque je me retrouve dans une situation de conflit, j’essaye de ne jamais dire des choses blessantes (même si elles me paraissent vraies et que je les entends dans ma tête), à l’autre, afin de ne pas exacerber sa colère et rester dans une communication saine, même s’il y a un désaccord. Mais voilà, l’autre ne fait pas forcément la même chose. Et lorsque cette personne (collègue, inconnu, ami ou conjoint) commence à dire des choses méchantes étant à court de mots et laissant son égo prendre le pouvoir de la communication, je me retourne face à un dilemme… jusqu’à quel point peut-on lâcher prise et ne pas réagir à ce que l’autre nous dit en cherchant à nous blesser?
Que faire lorsque l’on est confronté et obligé de travailler avec une personne qui ne fait pas confiance. Et cherche à trouver la faut. Enfin une mauvaise personne quoi! L’affronter ou laisser couler ?
Et le 3e cas c’est une situation de couple compliquée.
Effectivement, comment faire pour gérer une personne difficile, une personne toxique, avec qui on a du mal à communiquer, à se faire comprendre.
Qu’est qu’une personne toxique?
Une personne toxique c’est une personne qui va affecter notre état d’être, car on a des liens, plus ou moins forts, avec elle. Ça peut être un collègue de travail, un conjoint(e), ou encore un membre de sa famille.
Une personne toxique, cela ne veut pas forcément dire qu’elle est malveillante ou qu’elle veut nous manipuler. Dans la majorité des cas, c’est une personne qui souffre, et qui communique sa souffrance: une personne qui passe par un épisode de dépression, qui manque de confiance en elle, qui a beaucoup de stress, ou encore qui n’a jamais appris à bien communiquer.
L’état de mal-être d’une personne toxique risque alors de se répercuter sur notre propose état.
Comment faire gérer une relation toxique?
Vous aujourd’hui, vous êtes peut être dans une dynamique de développement personnel, vous commencez à méditer, à faire un travail sur vous et vous êtes en face de quelqu’un qui n’est pas du tout dans la même dynamique. Il peut y avoir 2 préoccupations par rapport à cela.
La première, c’est de se demander comment être bien, comment pouvoir s’épanouir lorsque l’on est sans cesse au contact d’une personne qui nous plombe.
Et deuxièmement, comme la mentionné la personne qui a posé la question sur comment gérer une personne qui ne nous respecte pas, on peut se dire « si moi je développe de la tolérance, de la patience et de la bienveillance envers une personne qui est colère, qui ne respecte pas ou ne voie même pas mon point de vie, est-ce que je ne risque de me faire bouffer, qu’on abuse de moi, de ma tolérance.
Dans les 2 cas, lorsque l’on est face à une personne toxique, il y a un moment où l’on va se poser la question: comment gérer cette relation?
La réponse à cette question, comme c’est bien souvent le cas lorsqu’il s’agit d’améliorer de notre vie, ça va être de transformer notre perception par rapport à cette relation. Et on verra en détail par ce que j’entends par changer de perception.
Car en faisant cela on va pouvoir mieux prendre du recul – mentalement, émotionnellement – par rapport à cette personne et ensuite pouvoir prendre les bonnes décisions.
On va voir cela plus en détail.
On va découvrir les 2 questions qu’il faut se poser pour pouvoir transformer notre perception, et j’en ai déjà un peu parlé dans l’épisode concernant la gestion d’un conflit.
Quelles sont ces 2 questions qu’il faut se poser lors d’une relation toxique
I. Quelle est l’utilité de cette relation?
Parfois on subit tellement la négativité, le mal-être de cette personne qu’on ne voit pas d’autres alternatives à une coupure ou à une solution miracle. On espère presque que la personne disparaisse de notre vie ou qu’elle change pour qu’elle puisse nous comprendre, nous apprécier, nous aimer à nouveau.
Mais cela n’arrive que très rarement. La réalité c’est que cette personne est pour l’instant dans votre vie et qu’elle ne va probablement pas changer du jour au lendemain.
La question qu’il faut alors se poser c’est qu’elle est l’utilité d’une telle relation, c’est d’essayer d’avoir une vision plus globale.
Une autre façon de poser la question, c’est de se demander quelles seraient les conséquences si vous cassez définitivement cette relation.
Si par exemple,vous êtes en conflit avec un collègue de travail, vous pouvez quitter votre travail pour résoudre ce problème.
Mais quelles seraient les conséquences d’un tel choix ?
Si vous êtes dans une relation amoureuse compliquée, vous pouvez partir, mais à quel prix?
Ce qui est important c’est de réaliser que c’est votre choix d’entretenir cette relation.
Je peux vous donner l’exemple d’une femme, qu’on va appeler Fabienne, la cinquantaine passée et que j’ai suivi dans mon cabinet chiropratique. Elle était dans une relation compliquée avec un homme. Cet homme était divorcé, mais il continuait à très régulièrement voir cette ex-femme. Cet homme soufflait le chaud et le froid à Mathilde, et bien sûr c’était difficile pour elle, car elle ne savait pas à quoi s’en tenir.
Quand je lui ai demandé le bon côté de cette relation ou l’utilité de cette relation. Elle m’a expliqué que cela lui permettait de vivre dans un plus grand appartement, qu’elle a appris un métier grâce à lui, et que malgré la situation compliquée il y avait encore de bons moments.
L’idée c’est d’élargir le champ de vision qui a tendance à se focaliser sur le problème et voir la globalité de la situation dans laquelle s’inscrit votre relation avec cette personne.
C’est de réaliser que si vous êtes peut-être tombé dans cette relation compliquée par hasard, ou malgré vous, mais c’est vous qui aujourd’hui choisissez d’entretenir cette relation avec cette personne.
J’insiste sur ce point, car beaucoup de personnes se positionnent en tant que victime par rapport à une relation toxique, elles ont l’impression d’être impuissante, et elle subisse la situation en attendant que l’extérieur change pour ne plus en souffrir.
Mais voilà l’extérieur, les autres ne vont pas agir spontanément dans votre intérêt. Il n’y a que vous qui pouvez agir sur cela. Comme on l’a vu, vous faites le choix d’entretenir cette relation et vous pouvez aussi faire le choix de transformer votre rapport à l’autre.
J’ai insisté sur ce point, car se positionner en tant que victime, remettre la responsabilité de son bine-être sur l’extérieur sur les autres, cela ne marche pas.
La bonne nouvelle, c’est qu’on pas de besoin de changer l’autre, pour améliorer cette relation, mais plutôt de développer plus de confiance en soi, plus de clarté sur ce que l’on attend de cette relation.
II. Où se trouve la bonté de cette personne « toxique »?
Pour agir avec plus de confiance et de clarté, il faut commencer par ressentir de la compassion envers cette personne. Vous allez me dire attend Moutassem, cette personne me plombe depuis des mois voir des années, et tu me dis de ressentir de la compassion pour elle.
La réponse est oui, et je vais faire de mon mieux pour expliquer pourquoi le fait de ressentir de la bienveillance, de la compassion envers les autres est ce qui va nous permettre d’agir avec confiance et fermeté.
Mais avant ça, découvrons comment ressentir de la compassion envers l’autre.
Vous mettre à la place de la personne avec qui vous êtes en conflit.
Imaginez être cette personne, imaginez comment étaient ses parents avec elle lorsqu’elle était enfant, son éducation, la culture dans laquelle elle a grandi.
Et même si vous connaissez que très peu cette personne qui peut être un voisin, un patron, ou un client, vous pouvez faire cet exercice.
Utilisez les indices à votre disposition – son allure, sa façon de parler, son apparence physique – pour imaginer son passé et sa perspective des choses.
Il est utile de comprendre que le comportement de cette personne est lié à toute une vie faite d’expériences diverses, et on peut même aller plus loin, à la vie de ses parents. Chacun d’entre nous est modelé par notre vécu et on filtre l’expérience du monde à travers un certain conditionnement.
Lorsqu’une personne agit d’une certaine façon avec vous, ne le prenez pas personnellement. Votre comportement et votre façon d’être sont juste des éléments déclencheurs qui mettent en route son comportement qui est conditionné sur toute une vie et qui n’a rien à voir avec vous.
Prendre ce recul est une attitude que l’on peut développer avec un peu de pratique. Cela permet d’avoir des relations plus apaisée et plus mature,et c’est aussi un précurseur au sentiment de compassion.
Pour résumé, mettez-vous dans les chaussures de cette personne et dites-vous qu’elle agit de la sorte non pas à cause de vous, mais parce qu’elle est aujourd’hui cette personne qui a été modelée par les expériences de sa vie.
Vous connectez aussi à l’enfant qui est en lui ou en elle.
Pourquoi le fait de ressentir de la compassion va vous aider à agir avec confiance?
La compassion permet de moins subir une relation toxique
Lorsque l’on ressent de la compassion, on élargit le champ de notre attention. On n’est plus uniquement focalisé sur soi, sur ce qu’on ressent, sur notre inconfort, on intègre l’autre dans notre champ d’intérêt.
Et dès qu’on est moins focalisé sur notre malheur, on va sortir de notre mode défensive. Parce que lorsque l’on est seulement connecté à notre souffrance, à nos problèmes, on entretient un mécanisme de défense. Ce mécanisme de défense, c’est quelque chose qui nous garde en retrait, et qui nous empêche de nous exprimer avec confiance.
C’est un vaste sujet le lien entre mode de défense et manque de confiance, et je vous invite à lire la série de 3 articles Reprendre confiance en soi, que je mettrais sur la page de cet épisode.
Mais ce que vous pouvez retenir aujourd’hui, c’est lorsque l’on n’est plus uniquement focalisé sur soi, on va être moins sur la défensive, plus clair sur ce qui est important pour soi et capable de l’exprimer.
Mon exemple: à chaque fois que j’ai été en conflit, qu’une personne m’agacer, plombait mon moral, ce n’est que lorsque j’arrivais à mettre un peu à sa place, que j’essayais d’avoir son point de vue, que j’arrivais à me sortir de cette relation toxique. Tout se suite cela permet d’être moins vulnérable, moins réactif à l’attitude de l’autre personne,
cela aide à sortir de cette espèce de brouillard dans lequel on peut être lorsque l’on est dans une relation lourde et compliquée,
et du coup cela m’aider à percevoir les choses d’une manière claire, et me permettait de mieux communiquer mon point de vue.
Et très souvent, cela contribue à changer l’autre, même si ce n’est pas l’objectif initial. La personne en face, lorsque l’on est plus dans la compassion et moins dans la défensive, et bien cette personne elle aussi a tendance à être moins sur la défensive et plus ouverte.
C’est pas toujours le cas, parfois la personne est tellement prise dans son mode de fonctionnement qu’il n’y a pas d’échange, mais au moins si vous ressentez de la bienveillance cela vous rendra moins vulnérable.
Ressentir de la compassion c’est le meilleur moyen de moins subir cette personne.
On a vu que tout d’abord il fallait prendre conscience que l’on n’est pas une victime et qu’on est responsable de notre bien-être, et que c’est seulement nous, vous, qui pouvez agir pour votre mieux-être.
Et deuxièmement on a vu que ressentir de la compassion c’est la première étape pour moins subir l’autre et pour voir plus clairement dans quelle direction on veut amener cette relation.
Alors bien sûr, il est évident, que certaines relations soient tellement imbriquées dans notre vie, que cela ne va pas être facile ou se faire du jour au lendemain.
Mais plus la relation est compliquée et chargée émotionnellement et plus l’opportunité de vous faire du bien est grande.
Il faut savoir qu’en général on attire certaines personnes dans sa vie, car elles résonnent avec certaines parties de notre personnalité et de notre inconscient.
Si une personne est particulièrement toxique pour vous, c’est qu’elle appuie sur certains boutons dans votre être qui sont particulièrement sensibles.
Comprendre qu’est ce que cette relation vous apporte, vous mettre dans les chaussures de cette personne, essayez de vraiment communiquer avec elle vous permettra d’apprendre beaucoup sur vous même.
Pico Iyer, voyageur et écrivain, a côtoyé le Dalaï-Lama durant ces 30 dernières années. Il a visité de multiples fois le célèbre chef spirituel dans sa maison en exil. Dans The Open Road: The Global Journey of the Fourteenth Dalaï-Lama, Pico Iyer décrit à quoi ressemble une journée dans la vie du Dalaï-Lama en commençant par le matin:
À 9 heures du matin… le Dalaï-Lama est lui déjà debout depuis plus de 5 heures, se réveillant, comme tous les matins, à 03:30. Il passe les premières 4 heures de sa journée à méditer sur les racines de la compassion et sur ce qu’il peut faire pour son peuple, pour « ses frères et soeurs chinois » qui tiennent son peuple en otage, et pour le reste du monde, tout en se préparant aussi à sa mort.
En plus de méditer sur la compassion, le chef spirituel passe une partie de sa matinée à s’informer sur l’état du monde. Dans la tradition bouddhiste, le Dalaï-Lama « explore le monde de près, pour en comprendre ses lois, et pouvoir ainsi voir ce que peut ou ne peut pas être fait dans les limites de ces lois. » Il utilise les médias de tous bords. Pico écrit:
En tant qu’étudiant de la vie, chef de son peuple avant l’âge de 5 ans, il écoute tous les matins Voice of America, la BBC East Asian Broadcat, la BBC World Service – parfois en méditant – et il dévore les magazines Time et Newsweek.
Si le Dalaï-Lama s’expose volontiers à toute cette information, il fait preuve de discernement et reste vigilant face à l’approche souvent biaisée des médias. La loi d’interdépendance chère au bouddhisme lui rappelle qu’il n’y a ni gentils ni méchants, que nous sommes tous interconnectés.
Pico écrit que le Dalaï-Lama considère que:
… nous faisons tous partie d’un même corps, et penser « moi » et « toi », c’est comme penser que l’intérêt de la main droite est différent de celui de la main gauche. Il est fou de vouloir entraver son voisin, car il fait partie intégrante de votre bien-être.
Le Dalaï-Lama consacre donc sa matinée à méditer sur la compassion, et sur comment contribuer à améliorer ce monde où tout est connecté et interdépendant. Mais, comme le note Pico, il sait que la solution aux problèmes du monde n’est pas extérieure, car elle ne peut que venir de l’intérieur de chacun d’entre nous. Pico écrit:
Les bouddhistes ne recherchent pas de solutions à l’extérieur d’eux-mêmes, mais simplement à s’éveiller intérieurement. L’instant où nous réalisons que nos destinés et notre bien-être sont mutuellement dépendants, le reste apparait naturellement (la méditation permet parfois à atteindre cette réalisation, et la réflexion permet de la consolider). Si vous croyez cela, la vie vous donnera l’occasion d’avoir beaucoup plus de moments d’éclats de rire, comme le Dalaï-Lama en est la preuve.
Le rituel matinal du Dalaï-Lama est une belle source d’inspiration. Il nous rappelle l’importance de cultiver la compassion.
Dans la continuité de cet article, je vous recommande de lire l’article sur le Bouddhisme Engagé.