Plus j’apprends, plus je médite et plus je m’en fous.
Désolé pour le langage, mais cette expression illustre bien, le ressenti que j’aimerais partager avec vous aujourd’hui dans cet épisode.
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Retranscription de l’épisode « Je m’en fous »
Plus j’apprends, plus je médite et plus je m’en fous.
Désolé pour le langage, mais cette expression illustre bien, le ressenti que j’aimerais partagé avec vous aujourd’hui dans cet épisode.
En effet, plus j’avance dans mon cheminement de vie et moins je me sens impliqué dans le quotidien.
Je croyais qu’en avançant, qu’en méditant régulièrement sur des années, la vie prendrait un sens de plus en plus clair, que je serais de plus en plus impliqué, que je ressentirais plus de compassion, mais, la réalité c’est que je semble de moins en moins concerné.
Il y a environ 2 mois, 3 copains sont venus en Thaïlande pour passer leurs vacances. Ils ont surtout passé du temps dans les îles du sud où je les retrouvais pour quelques jours lors de la fête du nouvel an bouddhiste, Songkran (voir vidéo). Et je les ai vus aussi à Bangkok où ils étaient de passage pour 2, 3 jours.
Se faire rattraper par les exigences du quotidien
L’une de ces 3 personnes est un proche ami, un ami de longue date. On se connait depuis plus de 20 ans, et on se taquine volontiers. Mais cette fois-ci j’ai remarqué qu’il n’avait pas beaucoup la forme. Il était taciturne et il faisait souvent la tête.
Dès qu’on parlait d’un sujet qui sortait un peu des thèmes légers auquel on peut s’attendre lorsque 4 gars vont boire un verre, il répondait par un « je m’en bats les ….. »
Pas très élégant, mais une expression qui là aussi révèle bien l’état d’esprit.
Tout ce qui ne porte pas sur son confort ou sur sa satisfaction immédiate ne semble pas l’intéresser.
Il y a encore quelques années, ils s’intéressaient à de nombreux domaines. Il avait l’aspiration de faire une activité qu’il lui plaisait vraiment et il voulait contribuer du positif au monde.
Et puis, il s’est laissé rattraper par un travail exigeant, des investissements immobiliers les mensualités qui vont avec …
Il est devenu plus sarcastique, plus rigide sur ses idées, et globalement moins marrant. Il est plus focalisé sur son confort, et il semble moins disposé à faire des efforts pour les autres à part peut-être pour sa famille.
Vous allez me dire, oh, Moutassem, pourquoi tu critiques comme ça ce garçon?
Ça ressemble à une critique, mais cela n’en est pas une.
D’ailleurs dès que le podcast sera publié je lui enverrais un email avec le lien pour qu’il puisse l’écouter avec un mot du type:
« Sawadee (hello en Thaïlandais), j’espère que tu as la forme. Je viens de publier un nouvel épisode du podcast et je parle de toi! Mais tu es le méchant dans l’histoire! Tu peux l’écouter ici: …. Take care, Bises.»
Ce n’est pas une critique, car je suis dans une dynamique très similaire à la sienne. J’ai reconnu chez lui un comportement identique au mien.
Comme lui, je semble être principalement intéressé par mon confort de vie.
Le moine dans son temple
Cela contraste avec un Matthieu Ricard. Ce moine bouddhiste, scientifique de formation, qui est devenu traducteur pour le Dalaï-Lama lors de ses visites en France. Lors d’un entretien avec un JJ Bourdin sur RMC (radio populaire en France) il a expliqué que lorsqu’il s’isolait dans son temple dans les montagnes du Népal ce n’est pas un acte solitaire et nombriliste. Bien au contraire, il médite pour la libération de la souffrance des êtres sensibles, humains comme animaux. Il a d’ailleurs écrit des ouvrages sur la bienveillance et sur la protection des animaux.
Je ne prétends pas être proche d’un Matthieu Ricard. Sa longue pratique de la méditation, son expérience, son investissement dans son cheminement spirituel sont différents des miens.
Mais néanmoins, je croyais qu’avec une pratique de plusieurs années je tendrais naturellement vers une ouverture envers les autres, un détachement de mes désirs de confort, et plus de compassion envers les autres.
La réalité c’est que mes priorités du moment sont de m’acheter une télé avec un plus grand écran, me faire plus souvent des week-ends à la plage, agrandir mon compte épargne, faire de plus beaux cadeaux à mes proches, etc.
On est bien loin d’oeuvrer pour la libération de la souffrance de tous les êtres sensibles!
Regardons comment j’en suis arrivé à ce point. Mais ne vous inquiétez pas, comme vous pouvez vous en doutez, ce podcast aura une fin positive avec un zeste de sagesse.
LA DÉSILLUSION EN 3 ÉTAPES
La première étape: L’effondrement des certitudes
Plus je lis sur un sujet, plus je l’approfondis et plus je développe une approche nuancée à ce dernier.
Que ce soit des sujets concernant la santé physique, la politique, la morale et l’éthique, les religions, la famille, les relations de couple, etc.
Ce qui auparavant pouvait sembler comme une évidence, lorsque scruté de plus près, se révèle être une croyance subjective partagée par un certain nombre de personnes à une époque donnée.
Avez-vous entendu parler de Drapetomania?
C’est une maladie mentale découverte par un médecin américain Samuel Cartwright. Elle fût acceptée et adoptée par ses confrères dans une bonne partie des États-Unis.
Quelle était la manifestation de cette maladie?
Cette maladie mentale causait chez les esclaves africains une puissante et irrationnelle envie de retrouver leur liberté.
Drapetomania du latin Drapete « un esclave en fuite » et Mania « folie »
Ce diagnostic créé en 1851 a bien entendu été depuis rebuté par la communauté médicale.
Et encore moins loin de nous, il y a seulement quelques décennies l’homosexualité était considérée comme une maladie psychologique, et la castration chimique était l’un des traitements utilisés.
Aujourd’hui ces 2 notions peuvent sembler ridicules, mais à leur époque cela était considéré comme la norme, étant moralement et « scientifiquement » approuvé.
Encore aujourd’hui nous suivons parfois aveuglément des habitudes, des règles, des conventions sans réaliser qu’elles ne sont pas immuables, qu’elles ne sont pas porteuses d’une vérité absolue.
Que ce soit l’idée que l’on se fait de la famille, du couple, de la société, de la politique… cette idée n’est souvent qu’un aspect de la réalité.
Et lorsque l’on creuse un peu un sujet, une norme, une tradition, on réalise que ce qui semblait être un socle solide sur lequel on pouvait prendre appui, finit par s’effriter et avec lui nos certitudes.
La première étape de la désillusion, de la perte d’intérêt pour un idéal, c’est lorsque les certitudes s’effondrent et avec elle le chemin que l’on pensait devoir prendre.
Cet effondrement des certitudes peut avoir lieu lorsqu’on lit beaucoup et qu’on reste curieux face à la vie, ou bien cela arrive simplement avec l’expérience, avec l’âge. Plus on vit, si on garde un minimum d’attention sur le monde dans lequel on évolue, on ressent que nos certitudes de jeunesse se sont assouplies.
Ou bien encore, la vie vient secouer violemment nos certitudes. Imaginez cette jeune femme qui grandit dans une famille croyante (l’église le dimanche) où les parents semblent former un couple épanoui. Elle aspire à créer sa propre famille, à avoir 3 enfants, à vivre dans le même quartier que ses parents, mais pas trop proche comme même. Elle rencontre un homme dont elle tombe follement amoureuse. Ils se marient. Et lorsqu’elle est enceinte de son premier enfant, son mari lui apprend qui la quitte pour une autre personne … et cette autre personne est un homme. Il lui dit qu’il est gay et qu’il ne peut plus se mentir, et lui propose de rester de bons amis.
Toutes les certitudes de cette jeune femme s’effondrent comme un château de cartes pris dans un courant d’air. L’idée qu’elle s’était faite de la relation de couple, de la famille, de sa vie se heurte à une réalité totalement différente. Le chemin tracé s’est effacé devant elle comme s’il n’avait jamais existé.
La perte des certitudes, qui encore une fois peuvent concerner tous les domaines de notre vie, peut donc survenir en douceur grâce à la curiosité et à l’honnêteté intellectuelle ou plus violemment lorsque la réalité décide de jouer en dehors des règles que l’on connait.
C’est vrai qu’il se peut que vous connaissiez autour de vous des personnes qui maintiennent de fortes certitudes sur la vie. Mais si vous les observez de plus près, vous devinerez la fragilité de leur système de croyance.
Lorsque je rencontre une personne qui manifeste de grandes certitudes sur un sujet, qu’il soit politique, social, culturel, ou spirituel, je ressens derrière l’enthousiasme l’effort nécessaire pour maintenir active leur croyance.
Les 3 stratégies pour éviter la réalité
Les personnes qui entretiennent des certitudes doivent souvent faire appel à ces 3 stratégies pour éviter de se laisser rattraper par la réalité:
1. Ces personnes ne cherchent pas à découvrir des points de vue différents, et se nourrissent uniquement d’informations confirmant et renforçant leur croyance.
Pour exemple, l’autre soir je dîner avec un chercheur allemand avant son retour en Allemagne. Il travaille sur une thèse portant sur ses compatriotes expatriés en Thaïlande. Il m’a parlé d’une des personnes qu’il venait d’intervewier pour ses recherches. L’homme, 55 ans, ancien travailleur dans le bâtiment lui a expliqué qu’il ne voulait pas rentrer vivre en Allemagne à cause de l’islamisation du pays. À chaque fois, qu’il y retournait en vacance à Munich, il voyait de plus en plus de barbus. Lors de ces dernières vacances, il a été dans sa terrasse de café préférée pour boire un verre, et sur la table à côté il y avait 4 Arabes qui parlaient leur langue et qui ne buvaient même pas d’alcool. Cela l’a mis très mal à l’aise. Il a déclaré qu’il y avait de plus en plus d’insécurité et que des amis à lui avaient des voisins qui connaissaient une personne s’étant fait agresser.
Cet homme avait une idée arrêtée et intrangisante sur la situation.
À l’opposé de cela poursuivi mon pote chercheur il a rencontré une jeune Allemande de passage à Bangkok. Habituée du bénévolat, elle lui expliquait que les familles de réfugiés qu’elle avait rencontrées avaient le coeur sur la main. C’était des personnes décentes, respectueuses et travailleuses. Ces réfugiés avaient pour beaucoup un savoir-faire et étaient prêts à participer dans l’économie du pays. Cette jeune femme ne comprenait pas pourquoi l’Europe n’accueillait pas plus de réfugiés et concernant l’insécurité notait que c’était une fausse perception du au politique d’extrême droite qui se nourrissait sur la peur de l’autre.
Ces deux personnes, le retraité du bâtiment et la jeune bénévole, l’un dans la nostalgie et l’autre dans l’idéalisme, n’acceptaient de voir qu’un aspect de la réalité.
2. Il justifie leurs idées par une figure d’autorité, que ce soit les résultats d’une recherche scientifique ou un livre sacré. Il voit avec suspicion toute autres étude ou explication venant confronter leur réalité.
On a vu que les Américains du sud justifiaient l’esclavagisme par la psychologie, comme plus tard les Aryens justifieront leur théorie de race supérieure par la médecine. Ce qui est perçu comme autorité (porteur de la vérité) vient appuyer une croyance.
La religion a aussi longtemps servi de figure d’autorité.
Les riches propriétaires, de plantation de coton, pour reprendre l’exemple de l’esclavage, n’avaient aucun scrupule, car en plus de la science, la bible aussi justifiait l’esclavage:
De nos jours encore, les textes religieux servent à justifier des comportements extrêmes. Le radicalisme musulman justifie le meurtre par l’interprétation d’un livre écrit au moyen âge.
Le second point est d’une part reposer ses croyances sur une autorité perçue comme absolue (que soit la science ou la parole de dieu) et d’autre part voir avec suspicion ou même hostilité tout autre point de vue.
C’est d’ailleurs ce que l’on appelle un Dogme.
Définition de Dogme (wikipedia)
Dogme est défini comme une affirmation considérée comme fondamentale, incontestable et intangible par une autorité politique, philosophique ou religieuse.
3. Et enfin troisièmement, les personnes qui s’accrochent à leurs certitudes défendent durement leur point de vue et prennent le sujet très personnellement.
Ce troisième point est révélateur de l’effet stabilisant que peut avoir une croyance. Suivre des règles clairement établies donne un semblant de stabilité et de sécurité. Cela entretient l’idée que si l’on agit de la sorte on aura ce résultat. Et lorsque la certitude est remise en question, c’est notre sentiment de sécurité qui est bousculé et en défendant une croyance la personne défend sa propre personne.
On vient de voir qu’il faut faire un certain effort pour maintenir des certitudes, que ce soit ne pas vouloir voir un autre point de vue, faire totalement confiance à une figure d’autorité ou croire que défendre nos certitudes c’est défendre notre propre personne.
On a vu aussi que les gens font cela, entretenir leurs certitudes, car cela leur donne un semblant de sécurité et de stabilité. Je dis un semblant de stabilité, car on a vu avec l’exemple de la jeune qui voulait 3 enfants: tout son système, externe et interne, s’est effondré lorsque son mari l’a quitté.
La vie généralement s’occupe de démonter nos certitudes. Que ce soit par une impulsion de curiosité et d’ouverture, ou que ce soit à travers les imprévus la vie s’arrange pour assouplir notre point de vue.
D’ailleurs si vous écoutez ce podcast, c’est que vous être suffisamment curieux, curieuse, pour découvrir la perspective d’une autre personne.
Si perdre ces certitudes peut sembler être une bonne chose, lorsque ce processus continue cela fait aussi perdre ses idéaux et l’envie d’agir pour les matérialiser.
Généralement la première certitude à s’effondrer c’est la sécurité garantie par ses parents. Enfant, notre sécurité repose totalement sur nos parents. Puis en grandissant, on prend conscience de leur propre vulnérabilité et par extension de la nôtre. Premier socle à s’effondrer.
Ensuite, les croyances/certitudes concernant le modèle du couple, la structure familiale, la liberté, la réussite au travail, la religion, les traditions, les coutumes, la spiritualité s’effritent eux aussi peu à peu.
Et l’on finit par arriver à un point où les modèles extérieurs ne peuvent plus nous aider.
Pour revenir à mon histoire, s’il y a encore quelques années j’entretenais certains idéaux – sur les soins de santé par exemple, sur le cheminement spirituel – cela n’a aussi pas résisté à l’expérience de la vie.
Oeuvrer au bien-être des autres m’a longtemps semblait comme une cause méritant de s’y investir totalement, comme une garantie de se sentir bien, car l’on fait du bien autour de soi.
Mais là aussi, si l’on creuse un peu. Soutenir l’être humain, c’est soutenir une espèce qui a causé ou contribuer à causer la disparition de 50% des gros mammifères en l’espace de 30,000 ans et qui détruit peu à peu la planète que l’accueille (et cette tendance à la destruction est loin de s’inverser).
Cela peut sembler comme un tableau bien sombre. Mais cette analyse ne vient pas d’un état défaitiste, d’un sentiment de résignation.
Tous les idéaux si on les creuse un peu ne résistent pas. On peut toujours trouver une bonne raison de ne pas les suivre.
Et j’en viens au point que je veux faire. Si rien à l’extérieur ne semble mériter notre totale implication, autant alors investir notre énergie et nos ressources à l’amélioration de notre confort de vie et celui de nos proches.
Mon ami, dont j’ai parlé au début de ce podcast, qui ne semble plus penser qu’à son confort en est certainement arriver à la même conclusion.
Mais au lieu de passer 20 minutes à le justifier comme je viens de le faire, il dit simplement: « je m’en bas les … »
Je rigole, car nous vivons tous la même chose, mais certains d’entre nous aiment mettre en mots ce qu’ils observent et d’autres vivent simplement cette expérience.
Toujours est-il que nous sommes nombreux à ne plus reposer sur des certitudes, sur des idéaux, préférant nous soucier de notre environnement immédiat et de notre confort.
C’est ce que j’appelle la première étape de la désillusion.
La seconde étape : c’est lorsque l’on réalise que notre confort n’est pas aussi important que ça
C’est vrai que cela me ferait plaisir de profiter des séries de Netflix sur un écran Total HD 4k incurvé de grande taille. Mais je sais aussi au fond que ce n’est pas important ou nécessaire. Les petits suppléments de confort, comme une télé neuve, ne jouent en définitive pas un grand rôle dans notre perception du bien-être.
Je me souviens d’une observation qui m’avait amusé il y a une quinzaine d’années de cela. Je commençais à travailler et la voiture que j’avais achetée était une Clio Renault, 1.6, avec quelques options. J’aimais bien cette voiture. Un jour j’ai été retrouvé un ami qui passait 2 mois de l’année en France et le reste au Nigéria. Sa famille avait fait fortune en Afrique, et il avait une grande maison secondaire, une villa plus exactement, dans le sud de la France. Il venait d’acheter lui aussi une nouvelle voiture, une porche 911 GTS toute neuve qui devait coûter 9 fois le prix de ma Clio.
Il m’a proposé de faire un tour. On a pris l’autoroute et en sortant du premier péage il a fait une accélération qui m’a collé au siège. Un vrai monstre cette voiture. Et puis il m’a proposé de prendre le volant. Dans l’aire de repos de l’autoroute, je m’installe donc dans la place conducteur. Le volant, le siège, le tableau de bord, tout ce qui était à porter de mes doigts ou de mes yeux révélaient des matières riches qui s’enchevêtraient parfaitement et esthétiquement présentant un tout harmonieux et luxueux. Les sièges baqués et la position ajustable du volant rendaient la position de conduite agréable et efficace. Broum, broum …. sous mon pied je sens avec un peu d’appréhension la mécanique prête à se déchainer. Je démarre tranquillement soucieux de ne pas faire une égratignure à la carrosserie au risque d’engloutir un mois de revenu.
Après un tour intéressant, je lui rends les commandes de son bolide. On revient chez lui pour garer à l’abri le précieux engin, et on prend ma voiture pour aller manger un bout au centre-ville de Nice.
Tout en conduisant, je discutais avec lui, et je ne sais pour quelle raison, en arrière-plan dans mon cerveau, je me croyais encore dans la porche et je me disais qu’au final ce n’est pas si différent de ma voiture.
Puis soudainement j’ai percuté que je conduisais ma Clio et cela m’a fait sourire.
C’était 2 voitures totalement différentes, mais au fond l’expérience d’être dans la voiture n’était pas si différente. Dans tous les cas, ce n’était pas 9x plus agréable.
Les ajouts au confort matériel n’ont en fait que peu d’effet sur la perception de bien-être. Plusieurs études ont montré qu’au-delà d’un certain minimum, avoir plus d’argent par exemple n’augmentait pas tant que ça la qualité de vie. Bien sûr si une famille n’arrive pas à se chauffer correctement l’hiver, si elle est limitée dans ses choix alimentaires, si elle ne fait aucune sorti sorti resto ou ciné, tout à cause à cause d’un budget très serré, avoir plus d’argent améliorera considérablement leur qualité de vie. Mais au-delà d’une certaine somme, gagner plus n’affecte que très peu la qualité de vie. Une personne qui gagne 30,000 euros par mois n’est pas 4 fois plus heureuse qu’une personne qui gagne 7,000 euros par mois. Selon une étude conduite à la Princeton University en 2010, la perception de qualité de vie est quasiment la même pour ces 2 groupes de personnes.
De plus, souvent le prix à payer pour s’offrir plus de confort ne résulte pas dans un net positif de bien-être. Si vous devez faire plus d’heures de travail, stresser davantage, ou vous endetter pour le supplément de confort, l’inconfort ressenti viendra effacer les gains de plaisir.
En d’autres termes, améliorer mon confort de vie, ce n’est pas si urgent que cela.
D’une part je n’ai plus d’idéal à suivre et d’autre part, m’acharner à travailler plus pour augmenter mon confort de vie n’est pas non plus ma priorité.
Que reste-t-il comme motivation?
Il y a le rapport aux autres vous allez me dire. Et effectivement lorsque l’on met de côté ses certitudes, lorsque l’on ne s’attache plus uniquement au confort matériel, on réalise que ce qui semble important, ce qui semble le plus déterminer notre état d’être c’est le rapport aux autres.
Mais est-ce que cette réalisation va nous aider à donner une direction à notre vie, je ne crois pas non plus. Et c’est la troisième étape de la désillusion.
Oui je ressens de l’amour pour mes proches, de la tendresse pour les enfants en général, de la sympathie pour les gens autour de moi. Mais ces sentiments ne m’aident pas à déterminer une direction, à me motiver à agir dans un sens ou dans l’autre.
Oeuvrer pour le bien des enfants? On retombe dans l’idéalisme.
Améliorer la qualité de vie de mes proches? On a vu que plus de confort n’offre qu’un petit plus.
Me voilà donc sans idéal, sans réelle motivation d’acquérir plus, et sans savoir que faire des sentiments que je ressens envers mes proches et les autres.
En d’autres termes je m’en fous un peu. Le matin lorsque je me lève, je n’ai pas une destination à poursuivre.
Et pourtant je n’ai jamais été autant productif et autant ouvert aux autres. Je ressens un bon niveau de vitalité, j’ai un bon flot de créativité, et je connecte facilement avec les autres. Et globalement, je ressens au quotidien un sentiment d’appréciation.
Cela peut sembler paradoxal, mais le fait de ne pas s’attacher à des certitudes, de savoir que plus de confort serait bien, mais que cela peut attendre, et de ressentir des émotions pour les gens autour de soi sans chercher à les contrôler, et bien tout cela permet d’avoir une bien plus grande disponibilité à ce que l’on ressent.
Lorsqu’on ne cherche plus à créer un quotidien à l’image d’un idéal qu’il soit philosophique, qu’il représente un certain cadre de vie, ou un type de relation personnelle ou familiale, et bien, on devient bien plus libre d’être et d’agir dans le présent. On finit par faire ce que l’on aime vraiment, pour ma part c’est lire, écrire et interagir avec les autres.
Je vous invite maintenant à tourner le miroir vers vous. Si vous mettez de côté vos idéaux, votre envie d’améliorer votre niveau de vie, ou vos aspirations pour un certain type de relation, que se passe-t-il?
Est-ce que vous pouvez ressentir qu’au final ce qui a de l’importance c’est ce moment de pause où l’on s’arrête de vouloir et l’on est présent à soi.
Puis agir à partir de cet état d’attention c’est vraiment agir. On ne s’attache plus aux résultats de nos actions, car on ne peut pas les connaître à l’avance. On ne vit plus pour créer une vie imaginée et prédéterminée.
Lorsque l’on parle de sortir des sentiers battus, de suivre sa voie, d’écouter sa petite voix intérieure, ce n’est pas de suivre un idéal de vie comme par exemple: « j’aimerais devenir guérisseur, ouvrir une maison d’hôte et y proposer mes soins ainsi que des cours de yoga et un buffet bio. » ; « suivre ma voie c’est pouvoir vivre de mon art et toucher le coeur des gens »
Non, suivre sa voie ce n’est pas de poursuivre un fantasme ou un futur idéal, c’est simplement vivre chaque instant pleinement et s’autoriser à ne pas savoir où l’on va.
Si je vous repose la question. Si vous mettez de côté tous vos désirs et vos envies pour le futur, qu’avez-vous envie de faire maintenant?
Peut-être est-ce de vous lever et vous étirer, ou mettre vos écouteurs et aller faire une balade en musique, ou bien passer du temps avec votre enfant, ou bien encore griffonner un dessin ou quelques notes sur un carnet.
Suivre ces petites inspirations intérieures est bien plus important que suivre de grands idéaux. Car cela vous rapproche de votre nature, cela vous apprend à être attentif à vos aspirations, et cela vous aidera aussi à être attentif aux aspirations des autres.
Les idéaux, la morale, l’étique, tout cela s’effiloche lorsque l’on intensifie notre état de présence. Arrêtons de vouloir modeler notre vie à un idéal qui n’a aucune réalité concrète.
Et laissons nous être surpris par la vie. On s’acharne à ajouter des expériences à la vie, et si plutôt on s’occupait d’ajouter de la vie aux expériences.
Merci d’avoir suivi ma réflexion de la semaine.
Dans les prochains épisodes je vais continuer à adresser les sujets sur comment développer plus de clarté en soi, comment dépasser les conditionnements et les peurs que l’on peut entretenir, et le rôle de la méditation.
Ref. et sources: Musique de fin de Bruce BecVar, Extrait RMC radio, Extrait « Je marche seul » Goldman.
7 réponses sur « Je M’En Fous (et pourquoi c’est une bonne chose) »
Bravo moutassem, je crois que vous avez touché , avec ce sujet, une des parties les plus importantes qui constituent notre vie mais aussi, il faut bien le dire , une des plus difficiles a acquérir!
Pas facile en effet, mais lorsque l’intention est là cela se met en place graduellement. Merci Jean-Jacques
Cela me rassure j’en suis là Je m’en fous, et pourtant les seules actions que je fais dans ma vie n’ont jamais été aussi précises et tout va comme par miracle peut être et sans doute car je ne suis plus en attente d »un résultat C’est finalement tranquille et reposant Merci Moutassem
Je suis exactement dans la même situation : je m’en fout et tout roule. Parce que je suis moins stressé, parce que j’ai plus confiance en moi grâce à la méditation ? Je n’en sais rien et …. je m’en fout :-)
Avec plaisir!
Lorsqu’on lâche prise par rapport à nos attentes on redevient disponible pour agir pleinement dans le présent.
Bonjour,
J ai apprécié votre podcast , il y a une certaine réflexion et une connaissance de notre esprit, des remises en cause intéressantes aussi ,
Cependant lorsque vous dites que participer positivement au monde perd de son sens quand on y réfléchit parce que les hommes détruiraient petit à petit la nature, je ne peux pas être d accord avec cela , c est une vision restrictive et partielle, nous sommes déjà presque dans une idéologie et une croyance là aussi.. Si les constats de dégradation sont là , rien ne prouve que c est l ensemble de l humanité qui opère , mais plutôt une idéologie du tout rentable et du tout calculable qui a complètement instrumentalisé la nature en temps que ressource mais qui demeure le fait d’1% de la population mondiale qui détient 50% des richesses. Ce n est donc pas à généraliser à mon sens à toute l espèce humaine.
Merci Gérard pour votre mot,
L’intention de cette observation (homo sapiens a depuis 30,000 ans contribué à la disparition de très nombreuses espèces, et cela bien avant l’avénement du capitalisme moderne) est que toute idéologie, ici « l’humanisme » porte du positif comme du négatif.